USA, URSS : même scénario ?

[1]4,404 words

English original here [2]

« Une époque de crise est une grande opportunité. » — Barack Hussein Obama

Dmitry Orlov
Reinventing Collapse: The Soviet Example and American Prospects [3]
Gabriola Island, Canada: New Society Publishers, 2008

Désespéré par la passivité de mon propre peuple, j’ai souvent pensé que l’effondrement des Etats-Unis pourrait être la seule chose qui pourrait le tourner contre le système qui désire sa destruction [1].

Il est vrai que cette perspective « catastrophiste » est une stratégie de désespoir. Car l’effondrement (ce que Joseph Tainter appelle un « trait récurrent des sociétés humaines » [2]) pourrait délégitimer le système existant et rendre les Blancs plus réceptifs à leurs intérêts raciaux et nationaux, mais, dans un scénario du pire, il pourrait poser des problèmes encore plus menaçants que ceux des 60 dernières années.

La littérature de l’effondrement est donc de la plus grande importance, surtout maintenant que le « Siècle Américain » semble approcher de sa fin peu glorieuse.

Parmi les nombreux ouvrages sur la chute des civilisations, les plus pertinents sont peut-être, pour des raisons évidentes, ceux qui traitent de l’effondrement soviétique en 1991. D’où l’intérêt de l’ouvrage d’Orlov, récemment publié.

Ingénieur informatique de formation, Orlov et sa famille juive russe émigrèrent aux USA dans les années 1970. Il a néanmoins maintenu des liens avec son pays de naissance, et y est retourné durant ces périodes qui ont précédé, traversé et suivi l’effondrement soviétique. Ecrivant dans une perspective écologique radicale, critique de la civilisation industrielle (qu’il associe implicitement – point de vue hébraïque ? – à la civilisation blanche), Orlov montre ce que l’effondrement entraîna en URSS et pourquoi cela peut aussi arriver aux USA.

Son livre, cependant, n’est pas un travail de spécialiste.

« Je ne suis pas », écrit-il, « un expert ou un spécialiste ou un activiste. Je suis plutôt un témoin oculaire. J’ai regardé l’effondrement de l’Union Soviétique et cela m’a donné la perspective nécessaire pour décrire ce à quoi l’effondrement américain ressemblera » (p. vii).

Il passe donc peu de temps à dessiner l’image globale – les forces structurelles conduisant l’effondrement – et se concentre plutôt sur ses processus et expériences « microcosmiques ». Cela fait de son livre un travail « personnel », sans prétention scientifique, mais cependant très intéressant et guidé par la dimension « humaine » primordiale de l’effondrement.

En dépit de leurs méthodes et styles différents, les deux superpuissances du XXe siècle sont vues par Orlov comme des « antipodes » de la même civilisation techno-économique dévouée à la gestion sociale, à la croissance économique, à l’accumulation matérielle, à la domination mondiale, et à la réalisation de la vision des Lumières d’un monde totalement rationalisé.

C’est pourquoi Orlov affirme que les USA et l’URSS recherchaient tous deux une vie meilleure par la science, abordant tous les problèmes humain en termes de problèmes  techniques. Ils étaient tous deux des puissances militaristes et impérialistes qui, par des guerres directes ou par procuration, transformèrent l’arène internationale en chaos et, bien qu’Orlov ne le mentionne pas, introduisirent dans le Tiers Monde des réformes qui causèrent sa croissance incontrôlée ; ils consacrèrent tous deux une fanfare incessante à célébrer leurs institutions démocratiques et égalitaires, aussi frauduleuses qu’elles soient ; tous deux agressèrent les croyances et les valeurs populaires au nom d’une rationalité supérieure, découragèrent les relations sociales traditionnelles, créèrent des formes de travail insensées et non-créatives, exaltèrent des valeurs matérialistes, réprimèrent la dissidence, recrutèrent des élites corrompues et vénales – et, le plus grave, se soucièrent peu ou pas du tout de la race blanche ou européenne, bien qu’en fait Orlov ne pense pas cela. On pourrait ajouter, et cela aussi ne figure pas dans le livre d’Orlov, que les USA et l’URSS furent tous deux des expérimentations sociales qui favorisèrent les Juifs, les plaçant en position dominante, eux et leurs valeurs.

La liste des similarités continue. Mais le point fondamental – à savoir que les USA et l’URSS furent des civilisations techno-économiques dévouées à des visions-du-monde à peu près analogues et en opposition avec la nature et avec notre être profond – semble assez indiscutable. Le fait est qu’un modèle civilisationnel s’effondra, et l’autre, pour des raisons à peu près similaires, se trouve maintenant face à la perspective d’un effondrement similaire.

Orlov n’accorde aucun crédit à la grandiloquence reaganienne selon laquelle les Etats-Unis ont vaincu l’Union Soviétique durant la Guerre Froide. Il affirme que l’effondrement de la seconde a peu à voir avec l’idéologie et encore moins avec l’influence américaine. Il l’attribue plutôt à son « économie en sous-performance chronique, associée à des niveaux records de dépenses militaires, de déficit commercial et de dette étrangère » (p. 8). Du fait de ces problèmes économiques, les « Russes moyens » eurent de plus en plus de mal à s’en sortir.

Quand les réformateurs soviétiques sous Mikhaïl Gorbatchev tentèrent finalement de s’attaquer à la stagnation au cœur du système, ils n’y parvinrent pas. Cet échec, combiné à l’humiliation militaire en Afghanistan et au désastre nucléaire de Tchernobyl, discrédita tellement l’Etat soviétique qu’il implosa.

Etant donné que le livre d’Orlov parut avant le crash financier américain de septembre 2008, il examine surtout ces faiblesses structurelles de l’économie US qui ressemblent le plus à celles de l’ancienne URSS – plutôt que ce système institutionnalisé de fraude responsable de l’une des grandes arnaques historiques.

Soulignant les défauts inhérents à l’économie US et remarquant qu’il a fallu deux décennies pour que les Etats-Unis rattrapent l’URSS, il suggère que les USA pourraient bientôt se trouver face à un sort similaire.

Comme beaucoup d’écologistes, il rejette la conviction facile que la société moderne est exempte des cycles de montée et de chute, caractéristiques des sociétés préindustrielles, ou que les actuels taux de croissance économique et démographiques peuvent continuer indéfiniment.

Les Etats-Unis, d’après lui, sont particulièrement vulnérables à l’effondrement, du fait de la base pétrolière de son économie [3]. Il souligne que les USA, avec leur « modèle d’empire gros consommateur d’énergie », sont plus dépendants du pétrole bon marché que toute autre économie industrielle, que leur production de pétrole brut a connu son « pic » en 1970, et que les trois quarts de leur énergie sont maintenant importés.

Toute montée des prix du pétrole sera donc payée par un déclin de la croissance économique et une élévation des prix de l’alimentaire (l’agriculture consommant beaucoup de pétrole). Dès que l’ère de l’énergie à bon marché prendra fin (à un certain moment, lorsqu’elle aura passé son pic), les économies mondiales devront subir des changements aussi importants que ceux qui accompagnèrent le début de l’industrialisation. Cela conduira à un nouveau déclin et finalement à un effondrement – qu’Orlov, citant le grand druide John Michael Greer, définit comme le moment où « la production ne parvient plus à satisfaire les exigences de maintenance pour le capital existant » (p. 2) [4]. C’est-à-dire que quand le système économique déclinant commencera à « consommer » son infrastructure (se cannibalisant lui-même, en fait) pour compenser le déclin de ses revenus, il ne fera que hâter sa chute inéluctable.

Mais, bien qu’étant d’une importance cruciale, l’énergie n’est qu’un des problèmes examinés par Orlov, pourtant adepte du « pic pétrolier ».

Parce que les Etats-Unis ont délocalisé la plus grande partie de leur industrie outre-mer, ne produisent plus la haute technologie dont ils dépendent, et comptent sur les importations pour la plupart de leurs besoins essentiels, ils ont connu un énorme déficit commercial, soutenu par des emprunts massifs sur les marchés monétaires étrangers (pour diverses raisons, l’URSS tomba dans des déficits et dettes commerciaux massifs dans les années 1980).

Les problèmes créés par l’accroissement des coûts de l’énergie pour l’Amérique et la financiarisation de son économie ont été aggravés par un budget militaire galopant, une dette pyramidale qui s’accroît à un taux exponentiel, et le déclin de son empire et de son « économie tributaire » outre-mer. Combinés à des désastres impériaux en Irak et en Afghanistan, une réputation internationale croissante d’incompétence et de corruption, des changements violents des modèles climatiques (qui produisent des ouragans destructeurs, comme Katrina, potentiellement capables de causer le blocage du système), et la défaillance prochaine de l’infrastructure négligée (ponts, digues, nappes d’eau empoisonnées, etc.), ces facteurs suggèrent que les USA pourraient finalement suivre l’URSS dans la poubelle de l’histoire.

Le gouvernement fédéral et les « élites politiques s’enrichissant elles-mêmes » qui s’en nourrissent ont, de plus, un clair intérêt à la « croissance perpétuelle » et à la sur-extension impériale, ce qui veut dire qu’on ne peut pas s’attendre à ce qu’ils fassent quelque chose de constructif pour prévenir l’effondrement imminent. A mesure que l’économie commencera à décliner, les rentrées fiscales aussi déclineront et la dette publique s’accroîtra.

La seule solution que les élites ont trouvée pour traiter la prochaine crise fiscale de l’Etat, jusqu’ici, est de faire marcher la planche à billets et d’introduire encore plus de papier sans valeur sur le marché.

L’explication d’Orlov de l’échec soviétique et sa prédiction d’un prochain effondrement américain, étant donné la nature impressionniste de son ouvrage, doit bien sûr être prise comme une simple suggestion, bien que la contraction économique, la disponibilité déclinante de l’énergie et la confusion politique accrue pointent déjà à l’horizon.

Son travail manque toutefois de précisions sur l’effondrement, il néglige toute considération de l’effondrement comme « processus politique », et il ignore des questions importantes sur la manière dont l’effondrement est survenu (en URSS) et surviendra (aux USA). On ne voit pas non plus clairement si un effondrement économique américain reflétera la soudaineté de l’effondrement soviétique (qui fut historiquement sans précédent) ou si, comme dans des cas plus traditionnels, il s’étendra sur plusieurs décennies.

Qualitativement plus convaincante est cependant l’affirmation d’Orlov selon laquelle l’Union Soviétique était mieux située que les Etats-Unis pour supporter une rupture politico-économique et s’en remettre.

Selon lui, les Américains voient leur « nation débiteuse et dépensière » comme un « pays de crème glacée et de soleil perpétuel » (p. 16). N’ayant jamais connu d’invasion, de guerre mondiale, de famine, ou de dictature sanglante, ils peuvent difficilement imaginer un avenir différent de leur passé. Plus que les Russes, les Américains ont été coupés de leur passé et reconçus comme des consommateurs égotistes dont le trait dominant est matérialiste plutôt qu’ethnique, historique ou culturel. Ils manquent aussi de la psychologie de résilience qui a été « implantée » chez les Russes habitués à la souffrance. Finalement, ils sont idéologiquement plus illusionnés par les prétentions du système, de même qu’ils sont plus intégrés dans ses institutions de plus en plus dysfonctionnelles.

Nés dans une nation moins heureuse, mais de meilleur aloi, les Russes soviétiques accordaient plus d’importance à la réussite et à la reconnaissance individuelles qu’aux succès économiques. Dans leurs vies, l’argent et les satisfactions matérialistes ne jouaient pas du tout le rôle qu’ils jouaient aux USA, car leurs besoins essentiels – travail, logement, services de base – étaient essentiellement fournis par leur économie collectivisée, et le style de vie consumériste associé à l’économie américaine n’était pas possible. Quand le système politique cessa de fonctionner et que l’économie formelle s’arrêta net, la dévastation morale et sociale qui affectera probablement les Américains n’existait simplement pas.

L’URSS était aussi favorisée en termes de nourriture et de logement. La plupart des logements soviétiques étaient propriété de l’Etat. Bien que « gris et sans âme », ils étaient bien construits, bien isolés, et conçus pour durer. Presque tous les logements étaient entourés de terrains publics sur lesquels les gens cultivaient des jardins potagers. Avant l’effondrement, presque 90% des fournitures alimentaires du pays venait de ces jardins potagers et d’autres lopins de terre individuels, car le communisme avait transformé l’agriculture russe, jadis le grenier à blé de l’Europe, en cas désespéré.

Le régime soviétique avait aussi la phobie des émeutes de la faim, et presque toutes les villes avaient de grandes réserves de céréales pour les cas d’urgence. Cela rendait le système alimentaire soviétique presque invulnérable à la rupture. Après l’effondrement, la plupart des gens furent donc capables de garder un toit au-dessus de leur tête et de se fournir en alimentation. Toutes les utilités soviétiques, comme le chauffage, l’eau courante, l’électricité, et l’enlèvement des ordures, étaient aussi publiques et purent continuer à fonctionner même après la dissolution de l’Etat central. Et surtout, le logement russe était presque totalement urbain, situé près du dense réseau de transports publics du pays, qui continua à fonctionner.

Cela ne sera pas le cas aux Etats-Unis, qu’ils subissent un effondrement soudain de type soviétique, ou, comme c’est plus probable, qu’ils connaissent une longue période de déclin.

La plupart des Américains, qui ne sont pas propriétaires de leurs maisons, se retrouveront dans tous les cas face à la faillite, à l’expulsion, et deviendront des sans-abri.

Ils auront aussi des problèmes pour se nourrir, dès que les rayons de leurs supermarchés de banlieues, remplis par des livraisons juste à temps, seront vides.

Parce que tout le pays est construit autour de l’automobile – le logement, les magasins, le travail sont presque inaccessibles sans elle –, quand l’économie sera au plus bas et que les coûts en énergie deviendront prohibitifs, cette dépendance à la voiture se révélera catastrophique. Même dans l’Union Soviétique riche en pétrole, il y eut des pénuries de carburant et un rationnement sévère.

Sans fournitures intérieures importantes d’essence et sans pièces de rechange pour leurs autos construites à l’étranger, les Américains des banlieues se retrouveront en panne.

Orlov pense qu’il y aura un exode massif hors des banlieues éloignées, car les gens seront obligés de se rapprocher des centres où les réseaux de fourniture et de distribution resteront opératifs. Si cela devait survenir, le monde se concentrera dans des zones qui pourront être parcourues à pied ou à vélo, le commerce à longue distance et mondial sera radicalement réduit, et les principes-clés de la mondialisation deviendront totalement intenables. Plus généralement, « le monde » deviendra « le local », et l’autosuffisance la vertu suprême.

Le consumérisme deviendra alors une chose du passé. Bien que l’économie soviétique était fameuse pour son manque de biens de consommation, elle faisait tout de même en sorte que les choses soient durables, à quelques exceptions près. Les biens américains, par contre, sont produits avec des cycles de remplacement artificiellement courts et sont souvent en plastique, ce qui signifie que dès que les navires porte-conteneurs cesseront d’arriver dans les ports américains beaucoup des biens de consommation qui sont devenus essentiels disparaîtront, sans pouvoir être remplacés.

La prospérité et le matérialisme plus grands de la vie américaine signifient aussi que des choses que la plus grande partie du monde considère comme un luxe – voitures, chauffage central, réfrigération, toilettes à chasse d’eau, téléphones cellulaires, nourriture emballée ou en boîte, machines à laver et électroménager – sont devenues des nécessités ; leur disparition sera ressentie plus intensément que dans le système soviétique de pauvreté socialisée.

Un effondrement (ou un déclin) américain entraînera donc probablement des pénuries de nourriture, de carburant, et d’innombrables biens de consommation, combinées à des coupures d’électricité, de gaz et d’eau ; des défaillances dans les systèmes de transport et d’autres infrastructures, incluant la santé publique ; de nombreuses fermetures d’usines et des licenciements massifs ; tout cela accompagné de confusion, de désespoir, et peut-être de violence.

La société dans son ensemble sera alors obligée de revenir à un mode de fonctionnement moins complexe ; les formes centralisées de contrôle disparaîtront ; les choses deviendront soudain « plus petites, plus simples, moins stratifiées, et socialement moins différenciées » ; les régions et les communautés se chargeront de la plus grande partie des tâches. S’il s’ensuivra une « guerre de tous contre tous » à la manière de Hobbes, c’est une autre question.

Quand la vieille économie commencera à se désintégrer, les vieilles formes de capital (argent liquide, actions, bons) perdront progressivement leur valeur. Les flottes de camions et d’avions privées de carburant deviendront de la ferraille. L’équipement scientifique et industriel pourrait être exporté sous forme d’échanges, avec les antiquités, la joaillerie, et les objets d’art. De nombreux emplois – installateurs de câbles, avocats, représentants de commerce, chirurgiens esthétiques, vendeurs, agents de change – deviendront superflus.

Etant donné la dislocation sociale et économique que cela entraînera, le système judiciaire sera probablement submergé, remplacé en partie par la sécurité privée et des unités de défense du voisinage. Beaucoup de lois seront ignorées. Les autorités établies, n’étant plus capables d’assurer la sécurité de leurs citoyens, cesseront presque certainement d’inspirer le respect et de nouvelles structures de pouvoir pourraient surgir. Les criminels organisés, les gangs, les anciens policiers, et les mercenaires militaires [contractors] trouveront de nouveaux emplois (ce sera une bonne époque pour être dans une Compagnie Militaire Privée).

Quand le marché établi s’écroulera, une économie non-officielle la remplacera probablement – une économie qui tournera largement autour de la liquidation et du recyclage de la vieille économie et qui sera basée sur un « accès direct aux ressources nécessaires ou la menace de la force, plutôt que sur la propriété réelle ou l’autorité légale » (p. 61).

Comme en Russie, nous verrons probablement des vieillards vendant leurs précieux biens sur des marchés en plein-air, des gens de la classe moyenne fouillant dans les poubelles, et les derniers magasins existant placés sous haute sécurité.

Tout cela arrivera à un peuple non seulement psychologiquement non-préparé à un bouleversement social, mais mal adapté aux dures réalités que celui-ci apportera. Les Américains, en fait, ont vécu si longtemps dans une déconnexion radicale entre leurs « croyances culturellement acceptables » et leurs expériences personnelles qu’ils sont déjà affligés de diverses maladies mentales, évidentes par les dizaines de millions de pilules d’antidépresseurs et de psychotropes qu’ils consomment quotidiennement. L’effondrement enverra un grand nombre d’entre eux de l’autre coté de la ligne – dans de nouveaux états de refus de la réalité ou, peut-être, dans un renouveau du millénarisme de la « fin des temps ».

La bonne nouvelle est que les Blancs soutiendront de moins en moins un régime qui ne leur fournira plus rien. En effet, puisque la légitimité du régime gestionnaire/thérapeutique de l’Amérique est si étroitement liée au bien-être économique, l’effondrement de ce dernier provoquera probablement aussi la chute de l’Etat, ou le « videra » de son contenu. Mais quoi qu’il arrive, la chute du système américain, qui est basé sur un système hautement contrôlé de « communications » et de consommation programmée (c’est-à-dire de produits et de vies sous emballage), conduira non pas au ravissement [*], mais un réveil très brutal.

C’est effrayant dans la mesure où les plus vulnérables à un effondrement, en plus des « larves de canapé » produites par notre « société prosthétique », sont les Blancs. Car ils sont les plus intégrés dans le système existant, ils sont les plus illusionnés par l’idéologie du Rêve Américain (qui affirme que si vous travaillez dur et que si vous jouez d’après les règles, vous réussirez), ils sont les plus dépouillés de leurs anciennes identités, de leur culture, et de leurs communautés (qui prennent une importance primordiale en temps de crise), et ils manquent de toute conscience d’être un peuple, basé sur une souche spécifique avec une culture spécifique, et manquent ainsi de toute conscience de la raison pour laquelle ils devraient agir d’une manière cohésive, comme un peuple.

Cependant, dès que les Blancs cesseront d’être abrités dans les bulles de leurs voitures ou dans leurs emplois protégés, ils n’auront pas d’autre choix que de faire face aux Noirs, aux Mexicains, aux Sikhs enturbannés, et à toute la faune exotique qui recouvre maintenant leur pays. A ce moment, ils pourraient découvrir qu’une nation n’est pas une « collection raciale hétéroclite », mais une communauté basée sur une « conscience de parenté » – c’est-à-dire sur la conscience d’être apparentés par le sang et l’esprit, d’appartenir à un peuple avec une ascendance partagée et une culture commune.

L’anarchie qui s’ensuivra pourrait aussi provoquer un conflit pour des raisons ethno-raciales, exacerbé par la possession de nombreuses armes à feu des deux cotés, qui pourrait bien conduire à des affrontements violents et peut-être à des formes de nettoyage ethnique.

Un tel conflit aura ici un bien plus grand rôle à jouer que dans la Russie ethniquement homogène, où les relations communautaires demeurèrent bonnes, sinon amicales (sauf concernant les Juifs et d’autres minorités non-russes).

Si les Blancs américains devaient rester inconscients de ce qu’ils sont en tant que peuple, ils deviendront presque certainement les victimes de la plus grande cohésion et conscience des non-Blancs, dont l’identité ethnique, les liens familiaux, et les motivations culturelles sont à la fois plus primitifs et plus puissants que les leurs. La grande question est alors de savoir si les Blancs succomberont passivement aux prédateurs noirs et bruns, comme des moutons à l’abattoir, ou si, dans un réveil, ils se joindront aux autres Blancs pour se défendre (je pense qu’il ne leur faudra pas longtemps pour comprendre que c’est une question de « nous ou eux »).

En outre, les hommes blancs d’âge mûr et financièrement aisés seront particulièrement vulnérables à la dépression nerveuse – puisque la carrière, les économies et les biens qu’ils ont mis une vie à acquérir disparaîtront en un instant. Le suicide, la paralysie émotionnelle, l’alcoolisme et l’addiction aux drogues les frapperont à des taux supérieurs à d’autres parties de la population. Leur fragilité sera encore aggravée par le fait que leurs expériences professionnelles les laisseront totalement non-qualifiés pour l’emploi dans une économie effondrée. Aujourd’hui concentrés dans les affaires, la gestion, les communications, la loi, la vente et l’information, ils découvriront que les immigrants non-blancs avec des connaissances pratiques comme charpentiers, mécaniciens et simples travailleurs sont mieux placés pour tirer avantage des opportunités d’emploi restantes.

En même temps, alors que les foyers de célibataire et les familles nucléaires se révéleront inviables, les Blancs découvriront que les familles élargies et les amis sont leurs atouts les plus précieux.

La famille russe n’était guère en meilleur état que la famille américaine, mais les conditions économiques et le manque de logements avant l’effondrement contribuèrent à maintenir les mariages, trois générations partageant souvent le même logement. Et comme la plupart des gens dans le monde, les Russes aussi tendaient à vivre toute leur vie dans le même secteur. En conséquence, ils avaient des liens familiaux étendus et connaissaient les gens parmi lesquels ils vivaient, deux facteurs qui facilitèrent leur survie.

Les Blancs américains manquent de ces réseaux étendus, et cela affectera leur capacité d’adaptation dans un monde effondré. Pour survivre, ils devront redécouvrir le sens de la communauté et faire revivre ces organisations et activités qui étaient autrefois un pilier de la société civile américaine. En passant à un style de vie du Tiers Monde, les Blancs devront alors redécouvrir leurs propres traditions ou revenir au genre de pratiques communes chez les non-Blancs.

Il ne fallut à la Russie qu’une décennie pour se remettre de son effondrement et retrouver des niveaux économiques pré-effondrement. Ce redressement relativement rapide fut dû à la capacité individuelle des Russes à s’adapter à des conditions de crise et aux immenses réserves pétrolières, qui permirent à leur économie de rebondir relativement vite, dès que les cours mondiaux du pétrole remontèrent.

Les Etats-Unis ne sont pas aussi bien situés. Il leur faudra plus longtemps pour se remettre de tout ce que l’effondrement provoquera, et il est probable qu’il n’y aura pas de « redressement » après le déclin de leur civilisation techno-économique (étant donné l’inévitable augmentation des coûts de l’énergie et l’impossibilité d’une économie mondialisée basée sur l’énergie bon marché). Il n’y a pas non plus une seule figure dans l’élite gouvernante américaine, capable de suivre l’exemple du nationaliste Vladimir Poutine, qui empêcha les oligarques de transformer la Russie post-effondrement en une colonie du système financier mondial.

Mais tout n’est pas aussi sombre dans ce scénario. Le choc, s’il se produit et quand il se produira, aidera les Blancs à se débarrasser de leurs illusions libérales, les conduira peut-être à découvrir ce qui est le plus important dans la vie, et, dans le meilleur des mondes possibles, les poussera à rétablir les liens raciaux-nationalistes qui firent d’eux jadis un grand peuple entreprenant.

Bien sûr, cela aurait été mieux s’ils n’avaient pas erré pendant 60 ans, attendant jusqu’au dernier moment pour retrouver les qualités aryennes qui leur permettront de surmonter l’âge sombre qui approche, mais mieux vaut que cela se fasse à 11h59 que jamais.

Dans cet interlude pré-effondrement, avant la chute, rien ne peut être fait pour empêcher l’inévitable ou adoucir ce qui ne peut pas être adouci. Nous sommes face, dans le déclin mondial de l’Amérique, non à un problème soluble, mais à une situation fâcheuse inévitable qui promet de balayer les illusions qui ont animé la vie américaine pour au moins les deux dernières générations – spécialement l’illusion que la croissance illimitée et la consommation illimitée sont possibles dans un monde de ressources finies.

Nous n’avons en outre absolument aucun contrôle sur ce qui est sur le point d’arriver : tous nos efforts seraient comme « agiter les orteils dans un tsunami ». La seule certitude maintenant est que le processus de déclin a commencé.

Pire, il n’y a pas de partis d’opposition, de formations politiques, ou de forces extraparlementaires représentant les intérêts blancs pour les guider, dès que la fumée se dissipera. La crise qui approche – ce temps qui fera leur succès ou leur ruine – vient donc à un moment relativement inopportun.

Cependant, en tant qu’individus et, plus important, en tant qu’Américains européens se souciant du sort de leur peuple, ils ont encore le temps – une civilisation s’effondre rarement tout d’un bloc, comme l’imaginent Orlov et les survivalistes, mais plutôt graduellement, souvent sur plusieurs décennies – de se tourner en eux-mêmes pour se préparer mentalement à l’effondrement économique approchant et, ainsi qu’ils le font, de commencer à se tourner vers l’extérieur pour développer ces « communautés résilientes » d’amis, de famille, et de membres de la tribu [5], qui, quand le moment frappera, pourraient non seulement les aider à survivre – mais les pousseront peut-être aussi à commencer à réfléchir à ce qui devrait succéder aux Etats-Unis effondrés.

Traduction française de l’article paru sur TOQ Online, 14 juillet 2009

Notes

[1] Michael O’Meara, « The Widening Gyre », https://counter-currents.com/2010/06/the-widening-gyre/ [4]

[2] Joseph A. Tainter, The Collapse of Complex Societies (Cambridge: Cambridge University Press, 1988), 5.

[3] L’ouvrage de base pour cette vision est le classique écologique : Donella H. Meadows et al., The Limits of Growth (New York : Universe Books, 1972).

[4] John Michael Greer, “How Civilizations Fall: A Theory of Catabolic Collapse”, http://www.xs4all.nl/-wtv/powerdown/greer.htm [5]

[*] Allusion au Ravissement [Rapture], important concept religieux protestant. (NDT)

[5] John Robb, “Tribes!” (6 mars 2009), http://globalguerrillas.typepad.com/globalguerrillas/2009/03/manufacturing-fictive-kinship-.html [6]